WEIDORJE (1978)

En France, on a de bons musiciens. Le problème est que le plus souvent ils demeurent totalement inconnus du grand public, et que pour pouvoir manger ils sont contraints de servir de faire-valoir à des peigne-culs comme Francis Cabrel, recevant au mieux un succès d'estime non viable financièrement lorsqu'ils se font chier à faire aboutir leurs propres projets artistiquement valables.

La considération qui précède s'applique point par point (Francis Cabrel inclus) à Bernard Paganotti, bassiste transfuge de Magma, et leader de l'éphémère Weidorje, dont l'unique album est un chef d'œuvre de la Zeuhl, éclairci et vivifié par la réintroduction dans le genre d'une fusion jazz-rock plus habituelle. Trois morceaux seulement sur le disque (+ 2 bonus live sur la réédition CD, que je n'ai pas entendus mais qui ont soi-disant un son pourri...), le premier composé par Paganotti recouvre une face entière et fait la part belle à sa basse customisée et aux percussions éclatantes de Kirt Rust (intitulé " Elohims voyage ", pour être tout à fait honnête je redoute ici une allusion raëlienne foireuse, d'autant plus si on prend au sérieux les notes explicatives au dos de la pochette et que je cite ici en – oui – intégralité :

"WEIDORJE (v-dorje) c’est l’attente d’une « soucoupe volante » qui viendra, un matin, nous prendre avec ses nouvelles valeurs, sains et saufs.

WEIDORJE signifierait roue céleste...",

ceci ne remettant toutefois pas en cause la qualité de la musique). Le chant est en onomatopées au lieu du kobaien réglementaire, et les thèmes paraissent peu variés et pas très "méchants" par rapport aux architectures complexes vandériennes, mais c'est quand même le morceau du disque qui se rapproche le plus fidèlement de Magma (et qui fait donc suffisamment peur pour qu'on refuse d'embarquer dans la soucoupe volante). Les deux autres morceaux sont signés par Patrick Gauthier de-chez-Heldon-en-face (passé en stage chez Magma avec Paganotti, notamment pour l'inauguration de la soucoupe volante sur "Üdü Wüdü"...), le meilleur – de l'album – étant à mon avis le long "Vilna" avec ses entrelacs de claviers (Gauthier et Jean-Philippe Goude) dont la section centrale en particulier est l'un des trucs les plus merveilleusement complexes que j'ai entendus (et préfigure ainsi un peu les motifs du genre math-rock...). Le final "Booldemug" est plus court et plus simple, mais aussi plus énergique... Tout ça perpétuellement soutenu par les cuivres des frères Guillard, et rehaussé des interventions étincelantes de Michel Ettori à la guitare.

A signaler, en outre, que le design de la pochette, pas à proprement parler beau, mais singulièrement reconnaissable, a été réalisé par Klaus Blasquiz avec ses petits doigts, sa règle, ses crayons, ses pinceaux, ses peintures, sa colle et ses ciseaux.

Ne vous laissez pas dissuader par le prix de l'objet (a priori, le pressage original sur le label Cobra illustré ci-dessus devrait vous délester d’une trentaine à une quarantaine d'euros chez un disquaire professionnel, en supposant qu'il l'ait en stock…) pour vous procurer cette petite merveille…

 

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